C’est le seul pays de la région à posséder une industrie cinématographique prospérant depuis le début de l’histoire du cinéma. Celle-ci a depuis le début imité celle des USA, construite autour du « star system ». Par conséquent, le film documentaire n’a jamais fait partie de la culture ni de la production, ni de l’enseignement du cinéma.
Depuis une dizaine d’années, une nouvelle génération de réalisateurs et de producteurs s’est lancée, à contre- courant, dans la production du film documentaire. Mais aucun ne pouvait rien produire sans les aides des fonds étrangers. Ce mouvement vient de se renforcer grâce à la récente révolution. Frustrés de ne jamais voir que les images de la propagande officielle, beaucoup de jeunes ont sauté le pas pendant la révolution et tentent de réaliser des documentaires par tous les moyens. Faute d’aide et surtout d’encadrement et de formation, des réseaux et des collectifs viennent de naître, au Caire et à Alexandrie principalement.
Institutions de tutelle
Ministère de la culture Centre cinématographique national
Production nationale actuelle
Les événements de la révolution et la demande internationale à ce sujet ont aidé à produire un nombre de films jamais égalé auparavant. A peu près 50 films ont été produits entre 2011-2012. Beaucoup d’entre eux s’apparente d’avantage au reportage TV qu’à l’écriture documentaire de création. Une bonne partie de ces films ont pu être finalisés grâce au soutien de fonds d’aide de télévision ou cinéma arabes et européens. Les films produits avec un financement uniquement égyptien ne dépassent pas 5 ou 6 .
Chaines TV publiques
Il existe autour de 15 chaînes entre nationales et régionales. Faute de compétences ou/et à cause de la censure, aucune ne s’intéresse au documentaire de création. A suivre les éventuels changements post-révolution.
Chaînes TV étrangères
Au moins 3 chaînes satellitaires (Al Jazeera Documentaire, Al Arabiya..) sont en perpétuelle demande de production et co-production. Cependant, leur ligne éditoriale est davantage informative, et leur cahier des charges est très strict, et ne laisse que peu de liberté à une écriture subjective de création.
Sociétés de productions
Par manque d’aide et surtout de réseau de distribution, il existe moins de 10 sociétés privées concernées par le documentaire. Avec l’éclosion d’une nouvelle génération de réalisateurs, ces sociétés ne parviennent pas à répondre à la demande. Certaines d’entre elles essayent d’allier production et formation, parce que beaucoup de ces jeunes réalisateurs manquent d’expérience et d’enseignement notamment pour écrire et développer leurs projets.
Faute de producteurs suffisants, plusieurs réseaux et collectifs se sont mis à s’organiser, principalement au Caire et plus récemment à Alexandrie. Ils se solidarisent pour auto-produire leurs films, produire les 1ers films des autres, organiser des ateliers de formation et montrer des films partout où c’est possible.
Parmi les plus actifs: au Caire il y a « SEMAT for production et distribution » qui est exclusivement dédié au documentaire, « Zero production », « Cimatheque »… Et bientôt « JanaKlees studio » à Alexandrie.
Recommandations
Partenariat et appui des collectifs « Semat » « Cimatheque ». Aide à la formation en production et distribution. Connecter les réseaux au niveau national et africain pour optimiser les ressources et les expériences.
Industries & équipements
Le parc d’équipement et de matériel est satisfaisant et accessible. Mais ceci ne concerne que le Caire et dans une moindre mesure Alexandrie. Au Caire principalement, des dizaines de sociétés privées louent différentes catégories de matériel professionnel. Les collectifs et les sociétés de production de documentaires disposent souvent de leur matériel propre, notamment de tournage et montage.
Ressources professionnelles
Il y a aujourd’hui autour de 30 réalisateurs de documentaire dont une partie évolue entre l’Egypte et l’étranger. Mais les vents de liberté de la révolution ont amené des dizaines de candidats à la réalisation qui sont à leurs premiers essais, partout en Egypte.
Les techniciens sont disponibles en grand nombre mais peu d’entre eux sont formés à l’écriture documentaire, surtout en montage et en prise de son.
Fonds d’aide & subventions Nationaux
Publics: Théoriquement, il existe depuis toujours un fonds d’aide pour le documentaire au sein du ministère de la culture, qui aide à la production d’à peu près 10 films par an.
Plusieurs autres ministères (Education, Affaires sociales, Agriculture…) dépensent également un budget annuel dans la production de documentaires. En réalité les fonds publics dépensent annuellement un budget important, produisant jusqu’à 40 films.
Cependant, le contrôle de la censure officielle et le manque de culture de cinéma documentaire des décideurs de ces fonds, n’ont jamais permis le développement d’une production de bonne qualité. Les producteurs et les réalisateurs indépendants ne postulent quasiment jamais pour ces aides, en raison de la censure des choix thématiques et de leur traitement.
- Il existe une quinzaine de TV nationales et régionales. La plupart d’entre elles diffusent des films documentaires achetés ou produits en Encore une fois, il s’agit plutôt de magazines, de reportages ou de films institutionnels….
Privés: 3 structures d’aide dont la plus importante est « Al Mawrid Al Thaqafy ». C’est une fondation qui a pour but de soutenir la création artistique en Egypte et dans d’autres pays de la région. Elle est financée par des fondations publiques et privées, européennes et américaines. Depuis peu, elle soutient aussi bien la production de films documentaires que l’organisation d’activités (ateliers, collectifs…) et d’événements cinématographiques (Festival de cinéma africain de Louxor…)
Certains instituts culturels (France, Allemagne..) apportent également des aides, qui vont de 5 000 à 40 000 $ par production. Mais jusqu’ici, ces aides étaient conditionnées par l’accord de la censure du Ministère de la culture.
Fonds d’aides de la région MENA (Moyen Orient et l’Afrique du Nord)
Récemment 4 nouveaux fonds d’aide destinés aux productions de la région MENA apporte une note d’espoir:
- Arab Fund for Arts and Culture (AFAC): créé en 2007, c’est le premier et unique fonds indépendant mis en place pour pallier le manque de fonds locaux dans les pays de la région MENA. Officiellement basé au Liban, ce fonds offre des aides dans six différentes catégories: Cinéma, Littérature, Théâtre, Arts de la scène, Arts visuels, Musique, Recherche, Formation et régionales événements. Il propose chaque année deux sessions d’aide au documentaire. Celle-ci concerne uniquement les projets en stade de développement. Son enveloppe budgétaire annuelle est en moyenne de 150 000 $.
- Doha Film Fund (DFF): ce fonds est une émanation de Doha Film Il concerne la production cinématographique de fiction, documentaire et expérimentale. Il offre des aides pour les trois différentes étapes de production (développement, production et post-production). Son enveloppe budgétaire annuelle est en moyenne de 400 000 $ repartis entre 2 sessions.
- « Sanad » Abu Dhabi Film Festival: enveloppe budgétaire moyenne de 250 000 $. Elle concerne les projets en étape de développement et de post-
- « Enjaaz » Dubai Film Festival: Il dispose d’une enveloppe budgétaire annuelle d’environ 400 000 $. Ces aides concernent les projets en étape de développement et de post-production.
Les 4 fonds accompagnent les projets soutenus en les invitants à participer à des marchés de films internationaux pour chercher d’autres fonds possibles.
Les producteurs et les réalisateurs locaux y participent très peu, par manque d’intérêt et par défaut de compétences en écriture de dossiers de projets documentaires.
Fonds d’aide européens:
Doc Med
Recommandations
Inciter les TV et les autres fonds d’aide publique, s’ils réussissent réellement à se démocratiser, à la co- production et à la diffusion de films de bonne qualité. Partenariat et éventuel financement « Al Mawrid Al Thaqafi».
Distribution, chaines TV & audiences
Il n’existe, pour l’heure, aucune structure publique ou privée de distribution de la production nationale. Peut-être que la forte demande du public, suite à la révolution, réussira à renverser la donne. En attendant, ce sont les producteurs et auteurs de films eux-mêmes qui essayent de s’en charger. Mais faute de compétence, peu de productions réussissent à être distribués .
Les chaine nationales ne distribuent que les productions internes, ou bien recyclent les productions réalisées grâce aux autres fonds publics des différents organismes et ministères.
Ce sont en revanche les TV satellitaires arabes et, parfois, européennes qui servent à certaines productions de relais de distribution. A part cela, les productions n’ont pas d’autres débouchés.
Société civile, underground & web-multimédia
Les diverses manifestations post-révolution autour du film documentaire, ont surpris tout le monde par l’intérêt et la demande de l’audience publique. Enfin libre, la société civile utilise largement le documentaire comme outil dans sa stratégie et son action. C’est à travers le web, que nombre d’ONG et associations réussissent à avoir accès à la production nationale. Mais pour l’heure, il n’existe aucune base de données à jour ou structuré.
Recommandations
Formation à la distribution du film documentaire. Incitation des TV à s’intéresser davantage au documentaire de création. Appui à la création d’une structure de distribution ou à une base de données et de distribution via le web. Aide à la distribution internationale. Sessions de formation et de sensibilisation pour les critiques de cinéma et journalistes.
Festivals
Peu de festivals programment le film documentaire.
- Le plus ancien et le plus connu est le « festival international du court-métrage et du documentaire d’Ismailia ». Il est organisé et financé par le ministère de la Sa programmation est centrée autour de la production arabe et européenne. Sa direction vient de changer et personne ne sait quel sera son avenir après la révolution.
- Cette année a vu la naissance d’un nouveau « festival du film africain de Louxor ». Il programme des films de fiction et Dans sa première édition, il a également présenté et inviter beaucoup de films d’écoles africaines de cinéma. Il prévoit également des ateliers en parallèle au festival. Il est financé par des fonds publiques nationaux et régionaux, ainsi que par une ONG Euro-Africaine (AfricAvenir).
- Festival « Entre femmes cinéastes » ; Un jeune festival dédié au cinéma de la femme arabe et latine. Le film documentaire prédomine la programmation. La dernière édition post- révolution a eu un grand succès public.
Recommandations
Inciter le festival d’Ismailia à s’intéresser davantage au film africain (voir création d’un prix du Doc africain). Développer l’action en faveur du film d’écoles de cinéma africain du « festival de Louxor ». Inciter le festival « Entre femmes » à inclure les films de femmes africaines ; cela l’aiderait également à enrichir sa programmation face à la faible production annuelle de films de femmes dans le monde Arabe.
Ecoles/Formations/Training
Il existe une pléthore d’écoles privées de formation aux techniques audio-visuelles et multimédia, dont le niveau est très moyen. Il y a 2 instituts supérieurs de cinéma, l’un public et l’autre privé. Mais ceux-ci non plus ne dispensent pas une formation correcte en cinéma documentaire.
Pour l’instant, seuls les ateliers organisés par les collectifs et certains centres culturels étrangers, de façon irrégulière, dispensent une approche de formation sérieuse. Ces ateliers servent souvent aussi de laboratoire de production de films courts. Cependant, aucun de ces ateliers ne fonctionne de façon régulière. La plupart d’entre eux sont financés ou soutenus par des fonds étrangers.
Recommandations
Aide à la mise en place d’une structure durable de formation, principalement en écriture et développement de projets ainsi qu’en montage et prise de son. Appui en ressource professionnelle à la formation au documentaire de l’institut supérieur de cinéma (public).
Archives, cinémathèques & droits d’auteurs
- La production du film documentaire étant indépendante, il n’existe toujours pas de structure d’archivage accessible. Des réseaux collectifs comme « Semat » « Cimatheque » tentent petit à petit de pallier ce Autrement, les copies de films ne sont disponibles qu’auprès de leurs propres auteurs ou producteurs.
- Il existe un office en charge de respecter les lois du copyright et droit voisin: ‘Society of Authors, Composers and Publishers of the Arab Republic of Egypt’ (SACERAU). Théoriquement, l’Egypte est signataire de pratiquement toutes les conventions internationales importantes en la matière.
Partenariats & sponsoring
Centre national cinématographique ; Festival d’Ismaïlia ; Festival de Louxor, Collectifs de cinéma documentaire, Association des réalisateurs de film documentaire…